Dans son premier message Urbi et Orbi (31/03), le Pape François a lancé un appel à la paix au Proche-Orient et à une solution politique en Syrie, alors que les minorités chrétiennes de Syrie, après celles d’Irak, continuent de faire les frais d’une violence qui ne cesse de croître dans leurs régions d’origine et à Alep notamment. L’Eglise Orthodoxe est, elle aussi, pour une solution politique en Syrie, et agit, auprès du pouvoir politique russe, afin de garantir la survie des minorités chrétiennes dans ce pays. L’Eglise Orthodoxe, qui peut se vanter d’être à nouveau écoutée et entendue au Kremlin, a des intérêts en Syrie et au Proche-Orient, et entend les défendre et les préserver. L’Eglise Catholique aussi (Voir l’analyse: “Proche-Orient: Le Vatican monte au créneau: Mgr Béchara el-Raï à Damas“). Parviendront-elles à rapprocher les points de vue entre Moscou et Washington? (Voir l’analyse: “Liban – Syrie: Le Vatican influencera-t-il la politique américaine?“).
Alors que les pays arabes et islamiques, ceux dominés par les courants de l’islam radical, entendre le wahhabisme et le salafisme, agissent pour provoquer, dans la violence la plus extrême, la chute du régime alaouite baasiste de Bachar el-Assad, des acteurs internationaux tendent de plus en plus à rechercher une solution politique à la crise syrienne ou, tout au moins, à s’impliquer davantage dans la recomposition du pouvoir politique dans la Syrie de l’après-Assad. Les Etats-Unis, avec son nouveau Secrétaire d’Etat John Kerry, s’impliquent de plus en plus fortement dans la crise, après avoir longtemps hésité à le faire (Voir l’analyse: “Syrie : Washington pose ses conditions à ses alliés avant les grandes manoeuvres avec Moscou“). Des pays européens très concernés par les évolutions syriennes et régionales, surtout la France et la Grande-Bretagne, sont tentés de freiner leur ardeur envers les rebelles les plus radicaux, et de procéder à une réévaluation de leurs stratégies en Syrie (Voir l’analyse: “Syrie: F. Hollande fait un geste envers Moscou et Washington“).
Entre-temps, la Ligue arabe ouvre la voie à des livraisons d’armes incontrôlables aux rebelles syriens, à travers la Turquie et la Jordanie surtout, alors que les services de renseignements turcs et ceux de plusieurs pays arabes (Arabie saoudite, Qatar, etc.) élargissent leurs domaines d’interventions sur la scène syrienne (rectrutement et acheminement de djihadistes, encadrement d’unités combattantes, etc.). Pour sa part, le régime syrien peut toujours compter sur ses propres moyens bien entendu, et sur le soutien opérationnel et militaire des Russes, des Iraniens et du Hezbollah. Tout cela se traduit par une violence qui ne cesse de croître, et qui vise, faute pour chacune des deux parties de pouvoir remporter une bataille décisive, à préparer d’éventuelles négociations futures sur l’avenir de la Syrie. C’est cette option que privilégient les Eglises catholique et orthodoxe. C’est aussi cette option que privilégient les acteurs internationaux, après avoir saisi, pour les plus engagés d’entre eux (France, Grande-Bretagne), la difficulté à renverser par la force le régime Assad et à passer la main automatiquement à un pouvoir collégial et démocratique.
Les minorités chrétiennes en Syrie fuient massivement leur pays d’origine, comme l’avaient fait avant elles les minorités chrétiennes d’Irak, alors que l’instabilité accentue la pression aussi sur les communautés chrétiennes du Liban. Les Eglises Catholique et Orthodoxe, contrairement à tous les autres acteurs locaux, régionaux et internationaux, ne peuvent s’offrir le luxe de délais plus longs, et d’interminables tergiversations politiques et diplomatiques (Voir l’analyse: “Syrie: Gesticulations diplomatiques et statuquo militaire“). Elles mettent la pression, avec leurs moyens diplomatiques et leurs capacités d’influence, afin d’accélérer le processus qui permettrait de trouver un règlement politique à la guerre en Syrie. Avant que cela ne soit trop tard, encore une fois, pour la présence chrétienne, catholique et orthodoxe, en Syrie et au Proche-Orient. Le Pape François l’a clairement signifié dans son premier message Urbi et Orbi.