Très rapidement, et malgré quelques délais à signaler çà et là, l’Arabie saoudite a pu monter un front arabo-sunnite contre le Qatar, associant, en réalité, ses alliés stratégiques et ses clients et obligés. Pour Riyad, il s’agit de profiter rapidement de la fenêtre de tir offerte par l’administration américaine et d’un contexte géopolitique régional et international perçu comme favorable, pour frapper un grand coup et marquer des points décisifs dans son bras de fer avec l’Iran. Car, en effet, derrière ce stand-off dans le Golfe, la volonté urgente de Riyad de consolider ses remparts anti-iraniens avant que n’arrive l’heure des grands arrangements imposés.
Plus les jours passent, plus on est en droit de se demander si Riyad et Abou Dhabi n’ont-ils pas commis une erreur d’appréciation en cherchant à imposer leur diktat à Doha ? Ou est-ce, carrément, une erreur stratégique dont les Saoudiens paieraient au final le prix fort ?
Faute d’un règlement politique rapide de la crise et d’une soumission sans conditions de l’émir Tamim Ben Hamad Al Thani, le leadership saoudien du monde arabo-sunnite ne serait plus qu’une chimère. Sans ce front arabo-sunnite, la crédibilité du leadership saoudien face à l’Iran (et à l’Etat Islamique d’ailleurs aussi) est sérieusement entamée.
Une dizaine de jours après l’éclatement de la crise, le Conseil arabe de Coopération du Golfe n’a jamais été autant fragilisé, le monde arabe aussi divisé, et la coalition arabo-islamique élargie aussi précaire.
Le Qatar, qui possède une série de leviers encore sous-exploités et qui lui permettront de résister aux pressions extérieures, a réussi à engager à ses côtés l’Iran, la Turquie qui risque de s’installer durablement dans le paysage régional, et dans une moindre mesure le Pakistan. La neutralité de plusieurs pays arabes et islamiques est un autre échec pour l’Arabie saoudite, et c’est autant de succès pour le Qatar. Quant à la communauté internationale, son approche évolue entre prudence et pragmatisme, le plus souvent de manière équilibrée et à égale distance entre les belligérants . Là aussi, les Saoudiens ne peuvent prétendre, encore aujourd’hui, à aucun gain net de leur bras de fer avec le Qatar.
Dans cette note de 4.424 mots, réservée à ses clients, MESP
(i) énumère les forces et faiblesses des deux camps dans ce bras de fer,
(ii) s’attarde sur les positions des divers acteurs régionaux et internationaux : Iran, Turquie, Etats-Unis, Russie, France, etc. , et
(iii) évalue les chances de succès des médiations en cours.
Enfin, dans cette note, MESP (iv) tente d’évaluer l’impact que pourrait avoir cette crise sur les grands projets de développement en cours au Qatar et sur les programmes de sécurité et de défense.