Tiraillé entre plusieurs fronts à la fois, le pouvoir saoudien, que tente de « résumer » à lui seul le jeune Mohammad Ben Salman Ben Abdulaziz, prince héritier du prince héritier et Ministre de la Défense, est sous pression comme il ne l’a jamais été auparavant.
La concentration des pouvoirs aux mains d’une personne pratiquement est à la fois une force et une faiblesse pour cette monarchie absolue. MBS impose ses choix, mais il n’est pas le souverain. Il se prépare à succéder à son père le roi Salman, mais il n’est que vice-Prince héritier.
Son challenger, aujourd’hui « co-équipier » en quelque sorte dans cette aventure, le prince héritier Mohammad Ben Nayef Ben Abdulaziz, vit lui aussi sous tension, puisque son accession au trône dépend, pratiquement, du bon vouloir de son second…
Trois scénarios circulent :
(i) la cohabitation entre MBN et MBS resterait nécessaire pour les deux princes et imposerait le respect de la préséance telle qu’établie;
(ii) MBN accèderait au trône à la disparition du roi Salman ou lors de son éventuelle abdication, et exclurait MBS de la course;
(iii) MBS se ferait nommer PH, du vivant de son père, au détriment de MBN.
Un quatrième scénario circule, au sein d’une partie “exilée” de la famille, et que nous avancerons malgré nos réserves:
(iv) MBN, l’ennemi numéro un du terrorisme islamique, et qui a déjà été visé par des tentatives d’assassinats, serait physiquement éliminé…, ce qui permettrait la progression normale de MBS vers le trône…
Pour le moment, le rapport des forces internes résultant du coup de palais mené par le clan Salman, et par MBS pour être précis, avec la complicité de MBN, semble bien installé, avec un souverain qui fait de la figuration, et un tandem MBN-MBS qui tient les ficelles du pouvoir.
En Arabie saoudite, c’est généralement ainsi, en attendant les catalyseurs, internes ou externes, qui provoqueraient un retournement brusque de la situation. Ces catalyseurs seraient d’ordre
(v) familial : inaptitude du roi à gouverner, décès, implosion du Comité d’Allégeance ;
(vi) national : terrorisme, tensions sociales, contraintes financières ;
(vii) régional : divergences avec les alliés arabes et régionaux: y compris les plus proches dont les EAU et l’Egypte avec lesquels les relations saoudiennes sont quelque peu tendues; guerres: Yémen, Syrie, Irak ;
(viii) international : choix et confirmation des alliances : Etats-Unis, France et UE, Russie, Turquie, Pakistan.
L’équation ainsi définie tend à se complexifier. Les rapports au sein du pouvoir saoudien en dépendront de façon directe ou indirecte. La stabilité du régime aussi.