C’est la France qui, aujourd’hui enfin, exporte le Rafale, et qui impose l’élargissement de la présence économique française sur les marchés porteurs. ‘L’équipe France’, loin d’être une illusion, n’est pas une force de vente capable, seule, d’engager les partenaires arabes et internationaux de la France dans des programmes stratégiques de cette envergure. ‘L’équipe France’, entendre les autorités politiques et leurs relais administratifs, est aux industriels stratégiques une force d’appoint utile voire nécessaire pour conclure et finaliser. C’est la France qui vend, et c’est le besoin de France chez ses partenaires qui sous-tend leurs choix en faveur de programmes stratégiques français. ‘L’équipe France’ fait le reste, et elle le fait bien.
Le Rafale illustre bien cette thèse, et d’autres contrats, militaires surtout mais pas seulement, la confortent aussi. Les clients, arabes dans ce cas, expliquent leur intérêt puis leur choix du Rafale par une série de paramètres dont la défense est confiée aux spécialistes : technologiques, opérationnels, financiers, etc. Un paramètre reste au-dessus de la mêlée, et il est de l’apanage exclusif et souverain des ultimes décideurs, c’est le paramètre politique. Sous ce titre, de nombreux sous-titres expliquant ces choix par des paramètres stratégiques, géopolitiques etc. Concrètement, une faiblesse stratégique française aurait occulté tout bonnement tous les paramètres techniques et experts, et faute de ‘besoin de France’ chez eux, les décideurs égyptiens et qataris n’auraient pas opté pour le Rafale, pour se limiter à ce seul programme et à ces deux pays. Dans ‘l’équipe France’ qui vend, il y a un chef d’Etat volontaire, un gouvernement déterminé, des industriels confiants. Il n’y a pas d’intermédiaires, dont la présence et le rôle sur ce type de marchés et dans le contexte actuel sont pour le moins superflus, voire contreproductifs. Mais il y a, surtout, un véritable Complexe Militaro-Industriel, dont le poids est relativisé par pudeur semble-t-il, et que sponsorise un dynamique Ministre de la Défense, avec la subtile complicité de l’Armée française. Ce CMI, confondu désormais par les partenaires, eux-mêmes militaires et politiques, avec la France, bénéficie de l’enthousiasme d’un gouvernement engagé pour les causes porteuses… Pour les Egyptiens, les Saoudiens, les Qataris, les Emiratis etc., ‘la France qui vend’ est celle qui s’engage directement pour défendre leurs vues et leurs intérêts, c’est la France qui montre des moyens militaires, diplomatiques, technologiques, crédibles et capables de défendre cet engagement. C’est la France qui impose aux alliés américains jusqu’à les court-circuiter si besoin est, et c’est la France qui va jusqu’à contrarier les Russes et s’opposer aux Iraniens. S’il y a une position qui résume tout cela, car à l’intersection de ce qui stimule chez les partenaires ce ‘besoin de France’, c’est bien celle de Ministre de la Défense et c’est bien ce ministre en particulier, qui diffuse une image qui concentre toutes les forces de l’équipe France. Il est triplement confondu par ses interlocuteurs arabes : avec le Président et le pouvoir politique, avec l’Armée, les Opex, la guerre contre le terrorisme etc., avec les industriels. Cette cohérence, côté français, est particulièrement utile dans le contexte actuel : un seul interlocuteur français, “complet”, agissant au nom d’une France valorisée et donc désirée.