Liban: Le PM libanais Tammam Salam à l’Elysée: quel rôle pour la France?

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Au Moyen-Orient, l’image de la France est tout le contraire de celle que donne le pouvoir à Paris, aux Français. La France donne une image de puissance crédible, auprès de ses partenaires, notamment auprès de l’Arabie saoudite son partenaire de référence. Le Liban se retrouve sur cet axe franco-saoudien, et son gouvernement, au croisement des intérêts saoudiens et iraniens, y trouve son compte. Le programme d’armement franco-saoudo-libanais, de $3md, piloté à Paris par ODAS, en est l’illustration. Paris pourrait profiter aussi d’une partie de la rallonge budgétaire saoudienne (1$md) pour financer d’autres programmes au profit des Forces armées et de sécurité libanaises. Les Français travaillent sur d’autres projets potentiellement utiles pour son influence politique, militaire, culturelle et économique au Liban (y compris l’exploitation du gaz et pétrole libanais, par Total et GDF Suez), et entendent consolider leur présence dans ce pays.

Pour la France donc, l’Arabie saoudite est un partenaire utile pour consolider ses acquis au Liban, mais un partenaire insuffisant. Le tour de table français englobe, désormais, l’Iran, où se rend, à nouveau, le directeur MENA du Quai d’Orsay Jean-François Giraud, la Turquie et le Qatar. Cela complique forcément le positionnement de Paris sur la scène levantine, mais cela paraît indispensable. Le Premier ministre libanais Tammam Salam, qui est un des hommes des Saoudiens au Liban, est, en quelque sorte, un Premier ministre “par procuration”, une procuration qui lui est faite par Saad Rafic Hariri. L’ex-Premier ministre et chef du Courant du Futur pro-saoudien est en relation directe avec l’Elysée, et gère avec l’équipe présidentielle les dossiers franco-libanais dont il a la charge, et surtout les dossiers franco-saoudo-libanais.

La visite de Salam à l’Elysée (10/12) est importante, pour le PM libanais, mais cette importance doit de ce fait être relativisée. Les programmes d’armement sont sur les rails, Salam pourrait souhaiter leur accélération. La question des réfugiés syriens au Liban dépasse et les Libanais et les Français, mais le PM ne perd rien à la soulever à nouveau devant le Président François Hollande. Les questions économiques et culturelles sont centrales pour les relations bilatérales, mais ce ne sont pas deux domaines dans lesquelles Salam risquent de se distinguer, aujourd’hui, et de proposer du nouveau. C’est surtout au niveau de la politique régionale, là où Salam n’a que la vision saoudienne, et où la France peut apporter des visions complémentaires, que les discussions pourraient être le plus utiles.


Giraud revient de Beyrouth, et son débriefing est attendu à l’Elysée, surtout que le cœur du sujet reste, aujourd’hui, la relance du dialogue interlibanais, entre Sunnites pro-saoudiens et Chiites pro-iraniens, et l’élection d’un nouveau Président de la république. Le Liban, dans sa composante saoudo-libanaise, mise sur un rôle français pour encadrer de possibles arrangements internes. La France, par son dynamisme régional et son engagement, a besoin du Liban pour arracher un succès diplomatique au Levant. Tammam Salam et François Hollande savent que leur partenariat ne pourrait aboutir sans y associer les autres parties internes (Hezbollah, Chrétiens), régionales (Iran, Turquie, Qatar) et internationales. Une visite nécessaire donc, mais loin d’être suffisante.

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