La visite à Damas, le 16/09, du Conseiller pour la Sécurité Nationale irakienne Faleh al-Fayyad, n’est pas passée inaperçue, surtout qu’elle a eu lieu au lendemain de la Conférence de Paris sur l’Irak (15/09) et alors que Washington et Paris et la coalition qu’ils ont constituée finalisent leur plan d’intervention contre l’Etat Islamique. Elle ne pouvait passer inaperçue puisque les Syriens eux-mêmes l’ont médiatisée et que le Président Bachar el-Assad a personnellement reçu ce haut responsable irakien proche de l’actuel Ministre des Affaires étrangères pro-américain Ibrahim al-Jaafari.
Les dirigeants arabes tentent de cerner les dessous de cette visite à Damas, d’un responsable sécuritaire irakien de premier rang, maintenu à son poste de NSC où il a été nommé par l’ex-Premier ministre Nouri al-Maliki, et qui affiche une proximité décomplexée avec Washington via Ibrahim al-Jaafari, tout en gravitant en même temps dans l’orbite iranienne.
Les questions que se pose le journal koweïtien al-Jarida (18/09) révèlent bien la difficulté à comprendre, et à accepter peut-être, la convergence d’intérêts actuelle entre le régime Assad qui s’érige en victime et en ennemi numéro un du terrorisme de l’EI, et l’administration américaine qui se lance dans une nouvelle aventure guerrière aux résultats plus qu’incertains contre ce même ennemi… On tente d’expliquer la visite du NSC irakien à Damas par des rivalités inter-chiites, ou par des rivalités au sein même du parti al-Daawa auquel appartiennent le Premier ministre Haïdar al-Abadi et son prédécesseur Nouri al-Maliki, ou encore par des pressions iraniennes sur le nouveau gouvernement d’al-Abadi. Mais le quotidien koweïtien va jusqu’à se demander s’il ne sagit pas en réalité d’une initiative américaine afin de coordonner avec la Syrie, et via l’Irak, la guerre contre l’EI.
Les Syriens, qui ne désespèrent pas d’être associés ouvertement à la guerre internationale contre l’EI, ne cessent de répéter depuis quelques jours qu’ils coordonnent leur guerre contre l’EI avec les Américains par l’intermédiaire d’une tierce partie. S’agit-il d’une coordination sécuritaire, dans son sens le plus étroit et surtout, une coordination qui n’a pas vocation à s’élargir en la présence du régime syrien actuel, comme le veulent, officiellement, les Américains? Ou s’agit-il du début d’une coopération large entre Damas et Washington, initiée autour de la problématique de l’EI, et grâce à Bagdad, et qui aura tendance à s’élargir en fonction de besoins nécessairement extensibles, comme l’espèrent les Syriens? Les deux scénarios ne plaisent certainement pas aux partenaires arabes de la coalition internationale contre l’EI, mais le premier scénario commence à être accepté et toléré, alors que le deuxième reste inimaginable pour les dirigeants arabes déterminés à renverser Bachar el-Assad. A suivre.