Arabie saoudite – France: Mohammad Ben Nayef à l’Elysée: une valeur sure pour les Français


Le Président français François Hollande, qui a choisi d’effectuer son premier déplacement officiel dans le monde arabe après son élection en Arabie saoudite, prépare sa deuxième visite dans le royaume, une visite retardée pour une multitude de raisons et qui pourrait se tenir avant le début du mois du ramadan. Hollande risque de ne pas rencontrer le Roi Abdullah Ben Abdulaziz, pour des raisons de santé, et devrait, au mieux, se contenter d’une rencontre protocolaire avec le souverain. Ce ne sont pas les interlocuteurs qui manqueraient en Arabie saoudite, loin de là, mais bien les interlocuteurs crédibles. Le Ministre de l’Intérieur le prince Mohammad Ben Nayef Ben Abdulaziz, l’ennemi numéro un d’al-Qaëda, qui vient d’être reçu à l’Elysée, avec tous les honneurs, fait partie de ceux-là.

Mohammad Ben Nayef vient d’effectuer sa première visite officielle à Paris, après avoir succédé à son père à l’Intérieur, et après sa visite, stratégique et incontournable, en novembre dernier, à la Maison-Blanche. “Monsieur sécurité” du royaume, confirmé à son poste alors que son cousin le prince Khaled Ben Sultan Ben Abdulaziz était brutalement évincé de la Défense, est perçu comme une personnalité centrale dans le système saoudien par les Américains qui lui avaient réservé un accueil royal à la Maison-Blanche, au Département d’Etat et au NSC etc. A Paris aussi, Mohammad Ben Nayef, qui a également rencontré les Ministres de l’Intérieur, de la Défense et des Affaires étrangères, est perçu comme un interlocuteur de premier rang en Arabie saoudite.

Mohammad Ben Nayef, dont l’influence repose sur son clan familial, sur les prérogatives de son Ministère qu’il manipule d’ailleurs à bon escient, et sur sa parfaite maîtrise de ses dossiers sensibles, fait partie des incontournables au sein de la classe dirigeante saoudienne. Il l’est dans le cadre du jeu politique interne, et dans le cadre de l’action globale contre le terrorisme. Les budgets de son Ministère, dont il ne cesse d’élargir les prérogatives, sont conséquents, et ses programmes, stratégiques, sont rarement contestés. A ce titre, il est un interlocuteur privilégié des gouvernements et des industriels de la défense et de la sécurité.

Mais il n’est pas le seul, malgré son poids relatif. Il y a bien entendu ses supérieurs hiérarchiques, entendre le Roi Abdullah et le Prince héritier Salman. Ce dernier, qui est aussi vice-Premier ministre et Ministre de la Défense, place ses fils et leurs hommes dans des postes pouvant faire de l’ombre au Ministre de l’Intérieur qui rejette toujours aujourd’hui que lui soit imposé par le palais un vice-Ministre de l’Intérieur… Salman vient, sous l’impulsion de son influent fils Mohammad Ben Salman, qui occupe officiellement la position de chef du diwan et conseiller particulier de son père, d’arrêter brutalement la carrière à la Défense de son neveu Khaled Ben Sultan en le remplaçant au poste de vice-Ministre par un de ses anciens subordonnés et ex-commandant de la RSN le prince Fahd Ben Abdullah Ben Mohammad. Le Roi consolide aussi les positions de ses propres fils et de leurs hommes, avec le risque (ou l’opportunité) d’un recentrage général du secteur de la sécurité et de la défense qui ne serait pas nécessairement à l’avantage (exclusif) de Mohammad Ben Nayef.

Ainsi, la création, annoncée le jour où Mohammad Ben Nayef se rendait à Paris, d’un Ministère de la Garde Nationale confié au commandant de la garde le prince Mitaab Ben Abdullah Ben Abdulaziz, s’inscrit dans ce cadre. Les proches du prince Mohammad Ben Nayef Ben Abdulaziz craignent une mainmise de Mitaab sur la Défense et la Sécurité, en fusionnant les Ministères de la Défense et de la Garde Nationale (Mitaab avait été reçu par le Président Hollande à l’Elysée le 11/06/12, à l’occasion de l’Eurosatory). Les plus pessimistes parmi eux redoutent des arrangements futurs qui ouvriraient la voie à Mitaab pour succéder à son oncle Salman comme Prince héritier à la mort du Roi et si les autres candidats, parmi lesquels le deuxième vice-Premier ministre le prince Muqrin Ben Abdulaziz ou encore le prince Mohammad Ben Nayef lui-même, étaient écartés… Les plus pragmatiques s’attendent à une réorganisation générale du secteur de la défense et de la sécurité qui permettrait une meilleure rationalisation des forces armées et de sécurité (Armée régulière, Garde Nationale, Forces de sécurité intérieure, Gardes-frontières, services de renseignements, etc.) et une meilleure coordination entre elles. Cela passerait aussi par la réhabilitation du Conseil de la Sécurité Nationale, dont le Secrétaire Général n’est autre que le très influent et très pro-américain chef des RG le prince Bandar Ben Sultan Ben Abdulaziz (frère du malheureux Khaled Ben Sultan).

Le schéma qui se dessine dès à présent, et en attendant que soient définitivement délimitées et arrêtées les prérogatives et missions des uns et des autres, tend à partager la responsabilité de la défense et de la sécurité des Al Saoud et du royaume, dans leur sens le plus large, entre les princes Mohammad Ben Nayef, Mitaab Ben Abdullah et Bandar Ben Sultan. De nombreux ajustements s’imposent au préalable.

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