Tous les ingrédients sont réunis pour que le Liban soit à nouveau déstabilisé. Des facteurs géopolitiques pressants : le conflit en Syrie, les tensions irano-arabes, le bras de fer russo-américain, etc. Des facteurs internes évidents : clivages politiques et confessionnels grandissants, tensions sociales, etc. Les « quatre colonnes » sont là, et bien visibles, pour que la situation générale se dégrade dans le pays. Pourtant, les Libanais, et surtout la classe politique libanaise, arrogante malgré son évidente impuissance, tiennent à voir, partout, une « cinquième colonne ».
Le mythe de la cinquième colonne, hérité de la guerre d’Espagne, et entretenu par l’histoire récente, devient en Orient et au Liban en particulier, un fantasme. Tous nos échecs, y compris les plus attendus et les plus inévitables, sont attribués à la cinquième colonne. Personne ne l’a jamais vue, personne ne la verra jamais, mais tous, toutes tendances politiques confondues, s’entendent, devant la déficience générale, à lui attribuer leurs erreurs, nos échecs et nos malheurs.
Cet ennemi, invisible, sévit aujourd’hui dans les zones frontalières entre le Liban et la Syrie pour entraîner les Libanais dans le conflit syrien. La « cinquième colonne » est entrée en action à Naher el-Bared et à Aïn el-Héloué pour semer le trouble entre les réfugiés palestiniens et l’Armée libanaise. « Elle » fait tout pour que la fitna confessionnelle éclate au Liban. La cinquième colonne, qui entretient la corruption, est responsable du manque d’éthique dans le pays, comme elle est responsable de la fanatisation de groupes islamiques, du déficit budgétaire de l’Etat et de la dette abyssale du pays, ou encore de l’insécurité généralisée à travers le pays, des pneus brûlés à chaque occasion, de la mauvaise gouvernance devenue une école bien suivie à tous les niveaux de l’Etat et de ses institutions, du drame écologique, etc.
Le mythe espagnol, né d’un drame, une guerre civile meurtrière, et entretenu par les drames qui suivront en Europe et par l’invasion de la France par les nazies, devient un fantasme libanais dont naissent des drames à la chaîne… La « cinquième colonne » est là. Les Libanais lui ont donné vie.